Ca y est, je suis enfin à bord du petit coucou de Tara Air qui va me ramener à Katmandou. Ca ne traîne pas, à peine installés, l’hôtesse distribue des petits bonbons, et l’avion se met en place pour le décollage. Les moteurs à fond, l’avion s’élance. La piste est en descente pour accélérer le plus vite possible, et on a vraiment l’impression que l’avion se jette dans la vide au bout de la piste. Ouf, pas de loupé, on vole au-dessus de la vallée, à moitié dans les nuages, mais c’est moins pire qu’à l’aller.
Quand la visibilité le permet, je fais quelques photos à travers le hublot couvert de buée. Les collines sont magnifiques, toutes cultivées en terrasses. Pas de gros dégâts visibles dans les campagnes. Puis on commence à survoler une zone un peu plus urbanisée, avec d’abord une multitude de fours à briques, puis toute une ville… je reconnais Bhaktapur, l’ancienne cité Newar qu’on avait vraiment adoré visiter. Mon cœur s’arrête de battre un temps, quand je distingue à travers le hublot la magnifique Durbar Square, et les ruines des superbes temples qui se sont écroulés. On fait un cercle complet au-dessus de la ville, et j’ai le temps de bien voir les dégâts. Un peu plus loin alors qu’on s’approche de l’aéroport, on commence à voir d’innombrables tentes oranges et bleues, dans lesquels ceux qui ont tout perdu se sont réfugiés. Je suis submergé d’émotion, et alors que j’étais impatient de quitter Lukla, j’appréhende maintenant le retour à Katmandou 🙁
On finit par se poser à Katmandou sans problème. Sur le tarmac, on voit plein d’avions qui déchargent de l’aide humanitaire. Sont présents l’armée indienne et l’armée thaïlandaise, mais très peu d’avions occidentaux. Je suis surpris et déçu de ne pas voir la France plus présente.
Le long de la route qui mène à l’hôtel, on observe quelques dégâts (des fissures dans la route, des murs écroulés), mais ce n’est pas catastrophique en apparence. La vie semble même avoir repris son cours un peu partout.
On déjeune à l’hôtel, où nous attendait déjà un représentant de l’agence de trekking venu de France. C’est sympa. Dans l’hôtel se trouve des humanitaires français, mais apparemment il ne peuvent pas partir en mission car il n’y a pas d’hélico disponible pour eux. Je suis à nouveau assez surpris de voir qu’ils sont logés comme nous dans un des meilleurs hôtels de la ville. D’ailleurs celui-ci semble avoir très bien résisté au séisme, à part la piscine qui s’est vidée. Il est quand même recommandé de rester dans le lobby et de ne pas monter dans les étages (les ascenseurs ne fonctionnent pas), mais on ne peut pas résister et on s’installe quand même dans les chambres bien confortables. L’eau chaude est coupée par contre.
L’après-midi, on décide d’aller visiter Patan qui se trouve juste à côté. Les dégâts sont considérables. La place est bouclée, il y a des militaires qui sont à l’oeuvre, probablement pour essayer de sauver les personnes qui pourraient être encore ensevelies. Dans les ruelles autour, beaucoup de murs se sont écroulés, certains balcons en bois également… je suis vraiment bouleversé. Mais on a quand même la surprise de visiter quelques temples qui ont bien résisté.
Le soir, on dîne à l’hôtel, et je vais me coucher tôt car mon avion pour rentrer en Europe est très tôt demain matin, et je dois refaire mon sac. La nuit sera bien agitée, puisque vers 3h du mat, l’hôtel tremble pendant plusieurs secondes, et comme je suis au deuxième étage dans un bâtiment tout en béton, j’ai très peur. Cette réplique ne dure pas longtemps, mais suffisamment quand même pour que je comprenne que le cauchemar n’est peut-être pas encore fini. Je me rendors quand même, mais le sommeil ne sera pas vraiment réparateur.
Quand j’arrive à l’aéroport le lendemain, c’est compliqué. Il y a beaucoup de monde qui fait la queue, et des représentants de plein de pays sont venus pour assister leurs ressortissants, mais encore une fois aucune présence française, alors qu’on peut voir des Canadiens, des Américains… C’est pas grave je vais me débrouiller comme un grand. L’enregistrement se déroule sans problème. Par contre à la sécurité je me fais refouler car mon visa a expiré d’une journée. Je tente de négocier en expliquant que j’ai été retardé à Lukla compte tenu des circonstances, mais le flic ne veut rien entendre, et me colle une amende, à régler en espèces. Malheureusement j’avais donné tout ce qu’il me restait d’argent liquide au guide la veille au soir. Je pars en courant chercher un ATM, mais aucun ne fonctionne dans l’aérogare. Je parviens finalement à trouver un distributeur un peu plus loin. On me refait un visa d’une semaine, juste pour que je puisse passer la douane et sortir du pays! J’arrive de justesse à l’embarquement, fouille rapide avant de prendre un bus et de monter dans l’avion, au beau milieu de cargos qui déchargent encore des tonnes d’aide.
Ca y est, on décolle. Je réalise que je serai probablement marqué à vie par ces événements, mais que ça restera aussi le plus beau trek de ma vie. Om Mani Padme Hum 🙂